Photo Martine |
La
nuit, quand les portes du salon des aiguilles se sont fermées sur le
public, quand la laine, sagement alignée sur les rayons des stands,
dort, attendant le lendemain pour qu’une voix demande : « Je veux
celle-ci » ; sur le stand des poupées de chiffon il en va tout autrement
la Mère l’Oie éructe :
« j’ai failli être vendue
dieu que j’ai eu peur !
mais elle m’a trouvée trop laide
sale gamine insupportable ! »
La
petite poupée paysanne, à ses côtés la rassure : « Tu es belle la Mère
l’Oie, ne te décourage pas ! » C’est certain, la Mère l’Oie trouvera
celui ou celle qu’elle espère pour partager sa vie, même si maintenant
elle cache son chagrin derrière son mauvais caractère
envie de pleurer
son cœur est tout cabossé-
une fleur d’or
À
la droite de la Mère l’Oie, deux pimbêches de porcelaine qui se
prennent pour des ladies, les yeux au plafond, l’air hautain, soupirent
avec mépris : « Le petit peuple se plaint toujours, alors la
basse-cour ! » Elles ne supportent pas de se trouver au beau milieu de
cette caverne d’Ali Baba, entre ces pauvresses de chiffon et ces
horribles babioles en céramique.
avec l’intolérance
le regard se fait dur
et le cœur s’aigrit
Mais
les poupées : Souris, Paysanne, Chat de chiffon, et même la Mère l’Oie
dont la colère est retombée, ces doudous tout mous, cousus avec soin
pour dispenser des câlins qui font le bonheur des jeunes enfants, n’en
n’ont cure. Ils connaissent la résilience, et rêvent déjà de ce bébé
d’amour, fille ou garçon, qui les adoptera, demain peut-être, qui sait ?
quand les portes du salon rouvriront. Il y a…
entre les bras d’un enfant
tant de secrets à partager-
tendresse
les yeux des poupées-chiffon
brillent du feu des étoiles.
Adamante Donsimoni - 31 janvier 2022 ©sacem
D'autre textes sur cette photo : L'Herbier de Poésies
L'enfant est beaucoup moins regardant que l'adulte. Une poupée de chiffon sera autant câlinée que la poupée précieuse ou celle en plastique telle la poupée Bella. A la maison nous en avons eues de toutes les ortes.
RépondreSupprimerJ'ai beaucoup aimé ton haïbun avec les dialogues.
La poupée Bella, ma toute dernière avec laquelle je n'ai jamais joué. J'en publierai une photo. Belle soirée, Martine.
SupprimerNous ne saurons jamais à quoi songent les doudous et autres poupées, mais nous savons combien ils ont su apaiser, consoler, se prêter à nos jeux... Portes grandes ouvertes sur l'enfance !
RépondreSupprimerOui, si les doudous pouvaient parler...
SupprimerQue c'est joli !
RépondreSupprimerJ'aime beaucoup ton interprétation et ces dialogues qui s'installent une fois la porte fermée.
De quoi rêver...
Je suis une adepte du rêve, comme toi avec le lutin bleu de ta bibliothèque qui te connaît si bien. Merci de ta visite, Quichottine. Au plaisir de te revoir, ici où dans un jardin parisien, extraordinaire bien entendu.
SupprimerBonjour, Adamante
RépondreSupprimerUn haïbun très original et vivant grâce aux dialogues. J'ai particulièrement aimé le tanka et...toute la prose poétique. Un pur bonheur!
Claudie
Merci Claudie. Je m'éloigne sans aucun doute des règles du haïbun façon puristes, je flirte ici avec le conte. Je me suis laissée emporter au fil de l'imaginaire du salon, la nuit.
SupprimerTout ce petit monde qui dort attend sans aucun doute que la porte s'ouvre sur une joie d'enfant venu y dénicher son futur trésor. Il y a tant de mystères sur les choix d'un doudou ou d'une poupée !
RépondreSupprimerFébrilité des enfants et silence complice des doudous, il y a là la tension émotionnelle des extrêmes qui finissent par se rejoindre pour le bonheur de tous. Merci Balaline.
Supprimer