Toi qui porte ta souffrance jusqu’au martyr pour tenter de
trouver la paix d’un paradis hypothétique, tu entraînes avec toi dans la mort
l’ennemi que tu rends responsable de ton mal-être. Regarde autour de toi.
Cet ennemi, c’est moi, je suis aussi toutes les victimes
passées ou à venir. Cet ennemi, le reconnais-tu ? C’est toi. Toi, l’affamé
d’amour qui, aveuglé par la douleur, croit le conquérir en brandissant la
haine.
Ta violence est un cri, j’en ressens toute la douleur, l’insondable
désespoir. Ce cri est le ferment de la guerre, éternel déchirement des peuples.
Égarement de qui n’a pas trouvé sa place.
L’enfance qui a mal dresse les poings, se jette dans la
tourmente et s’éloigne inexorablement de cette paix qu’il recherche. Il s’enlise
dans le désespoir.
De la guerre des boutons à la guerre en Syrie c’est le même
manque qui alimente la violence, crée l’humiliation. La riposte virile participe
du même principe, la crainte, souffrance qui naît de l’illusion de la
séparation.
Et pourtant, à chaque instant, ma partie guerrière lutte
pour ne pas crier à son tour et te pourfendre de son jugement. Je connais sa force,
je sais son désespoir et son impuissance à changer les choses. C’est dangereux
un tel désarroi. Alors, je l’accueille et la berce comme un enfant perdu. Je ne
veux pas me perdre dans ce tourbillon de folie, te perdre et me perdre à jamais,
en participant de ce mouvement infernal.
Voilà mon arme, chère désespérée partie de moi-même,
réunifiée, apaisée en moi, je
peux m’ouvrir à toi pour te recevoir, te bercer, te murmurer des paroles
d’espoir. Et mon corps, tout vibrant de tendresse, laisse couler ses larmes
silencieuses pour endiguer la pression de cette force à nulle autre pareille,
l’amour.
Toi, toi qui es moi entendras-tu cette vibration qui est
nous ?
Suite aux attentats en Belgique et partout ailleurs dans le monde.