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18/02/2024

Virgule du temps

Photo F.X.C

 


La pluie n’avait pas cessé de tomber, et le sol rendait son eau jusqu’à inonder les abords de la rivière. Quelques arbres s’étaient couchés. Sécheresses puis pluies avaient eu raison de leur résistance. Leurs racines offraient à présent le spectacle de leurs arabesques dansant au-dessus des eaux où elles se reflétaient. 

Les végétaux transcendent le visage de la mort par la beauté. Un petit passereau était venu inscrire un instant son image dans cet entremêlement de racines échevelées. C’était la vie qui s’inscrivait là, offrant à mon regard le tableau dépouillé de l’acceptation, une œuvre d’art dramatiquement belle 


instant de repos

avant le prochain envol -

virgule du temps




Adamante Donsimoni ©musicstart-sacem

12 février 2024



L'HERBIER DE POÉSIES PAGE 229



 

29/06/2020

Tout est parfait, Toujours

Le bain du soleil - Adamante -


Après tous ces jours de forte chaleur
Nuages et brumes masquent le soleil
Pourquoi se plaindre ?
Le feu a besoin de l’ombre
Les corps d’un retour au repos
À l’abandon
À soi
On s’oublie tellement
Dans l’agitation physique et mentale
Ce matin
Le ciel a tiré le voile
C’est ainsi 
Tout est parfait
Toujours 
Tout est enveloppé de la fraîcheur
Si nécessaire à la vie
La moindre de mes cellules chante
La caresse de l’eau en suspens dans l’air
Je frisonne dans les bras de l’unique
De la mère essentielle
Et les oiseaux la fêtent
Ils ne cessent de piailler en se poursuivant
C’est le réveil, le jeu, l’insouciance 
Tout est parfait
Toujours 
Mon cœur baigne
Et sur l’eau du lac de mes profondeurs
Flotte un sourire qui est mien
Je m’y ressource
Je retrouve la paix
La douceur de l’amour
À l’extérieur
La vie joue sa partition
Souvent désaccordée
Mais tout à cet instant
Invite au retour à soi
À l’accueil
Les bruits se font de plus en plus infimes
Lorsque je me retire ainsi en conscience 
Tout est parfait
Toujours 
Face à moi
La fenêtre dégoutte
En un rythme erratique
Suivant le métronome de la pesanteur
La vie est à l’écoute
C’est l’appel de la Terre
Les arbres épanouissent leurs feuillages
Vibrants de pluie
Accueillir l’eau c’est connaître le feu
Quelle symphonie vibratoire
Dans leurs frondaisons 
Tout est parfait
Toujours 
Mon corps se balance
Roseau fragile
Il suit la pulsation
De mes rivières intérieures
Rythme chamanique
Sous les impulsions du tambour de mon cœur
Alors
De la cellule où repose la Belle endormie
Qui un jour investit mon corps
Pour venir faire l’expérience de la Terre
Monte une mélodie
Et je me laisse prendre
Et je me laisse bercer
Ma voix s’envole
Roule
Un chant sans mots
Un chant de grotte souterraine
Un chant d’ombre attirée par la lumière
Le chant de l’eau primordiale 
Oui
Tout est parfait
Toujours. 
Adamante Donsimoni ©sacem


16/12/2016

La maison abandonnée



Les arbres se sont invités sur la terrasse. Le toit laisse passer la pluie. Il n’est plus aucun rire pour égayer les murs, la maison n’a plus rien à protéger.

Les oiseaux de nuit
y ont trouvé refuge
dans le silence

Il fut un temps où le jardin fleurissait de la main de l’homme. Les arbres, spectateurs muets, gardent le souvenir de fêtes estivales où naquirent des histoires d’amour.

Gravés dans le bois
quelques lettres et un cœur
disent le passé

Le vent a brisé les vitres, regard morne des fenêtres éteintes. L’abandon a taché les murs blancs, autrefois resplendissants sous le soleil.

Comme un souffle éteint
l’âme rongée de peine
la maison gémit

Tout revient à la Terre et les pierres patientes attendent ce retour. 


©Adamante (sacem)








03/03/2016

Métamorphoses


Il pleut.
Dans l’air froid et triste, le quotidien paraît sans saveur. Le regard, indifférent comme fixé au-dedans, retiré dans les profondeurs, accompagne les gouttes qui suivent sagement la loi de la pesanteur, se coller et glisser par la voie la plus rapide.
Mais parfois, est-ce à cause du flot qui ralentit la course, une goutte hésite, dévie pour suivre un chemin parallèle, ouvrir une autre voie, explorer l’inconnu. Elle quitte le rail.
Mais déjà, dans l’univers limbique, le ballet hypnotique imprime ses images. Derrière le regard inconscient la vigilance est en éveil. Elle interprète, crée, s’abstrait de la routine, enfante la magie. Alors sur le carreau perlé de pluie, des chevaux d’écume pénètrent le champ visuel. Ce tsunami hippique exprime la métamorphose. Rêve d’une petite couseuse attendant son époux que quelques sirènes informes, à peine esquissées, retiennent par la voix dans l’univers épique d’un mythe. Là, la faim se cache, non « dans un champ pierreux » où grincer des mâchoires, mais dans un tourment d’ondes vomissant des démons prêts à dévorer le héros assoupi.
Le char des légendes Ovidiennes surgit, éclaboussant le matin. Il s’effacera au premier rayon du soleil.

Dans la chambre aveugle « Ulysse » poursuit son rêve, il dort. Il est trop tôt.
Dans la cuisine « Pénélope » attend, tout engluée de nuit. Devant son premier café, elle tente de s’extraire de ses limbes.

Adamante (©sacem)




24/02/2015

Ermitage


Mon dessin terminé, je me retrouve seule. Je me lève, regarde au carreau. 
Dehors l’embouteillage excite la circulation, voix sinistres des klaxons sous la pluie. J’écoute, l’attention volontaire me fait glisser dans le retirement. 
Les gouttes brouillent le paysage, œuvre incertaine de ce jour sans conviction.
Le vent gémit. Il cherche son chemin au travers des imperfections de ma fenêtre et le trouve.
Par la loi des transformations le voici courant d’air, je frémis.
Je retourne à ma table de travail, note mes sentiments en attendant que le thé infuse.

Des pantoufles, un bon pull, une tasse fumante, le loisir de penser, le privilège de créer, j’ai la chance de ne pas vivre dans la rue.


©Adamante SACEM

05/07/2014

La danse de la pluie

Le ciel soudain se relâche, les nuages expirent le trop plein d’un long voyage. Crépitation des larmes venues d’un ailleurs lointain raconter la tristesse aux carreaux de mon bureau.

Quelque part dans le monde des gens meurent, de faim, de froid, d’abandon ; au fond d’un lit d’hôpital, sous les balles d’un assassin, les bombes d’une guerre ; dans un accident, un séisme, une tempête, un naufrage… Il est tant de façons de mourir,  tant de façons de léguer la souffrance à ceux qui survivent.

La honte, l’impuissance, le désarroi accompagnent le regard que nous portons sur la mort, car la mort de l’autre est toujours douloureuse.
Un homme, un animal, un arbre, une terre, la destruction d’un être est comme un rêve exhalant son dernier souffle, il s’effondre avec en son dernier regard la lueur de l’incompréhension.
C’est ce regard que m’apporte la pluie ce soir et le carreau me raconte celui de l’éléphant empoisonné pour ses défenses, celui du rhinocéros mourrant de septicémie sa corne tronçonnée, celui du clandestin qui se noie, celui du dealer victime d’un règlement de compte, celui du cancéreux victime de la folie industrielle et des économies de marché, celui de l’enfant soldat privé de rêve, celui du vieillard dont la main orpheline se crispe sur l’absence…

Le vent gémit son impuissance.

Je me sens vide, comme éloignée de moi, égarée ? pas vraiment, lasse ? certainement.
Et pourtant, au travers de ce vide incertain, je perçois comme une sorte de bien-être, une sorte de réalisation nourrie d’abandon. Je sais qu’au fond, sans en comprendre les pas, cette danse absurde est normale. J’expérimente l’usure des galets, l’hypnose. Et tandis que la pluie redouble d’intensité, je perçois, inscrites dans mes chairs, des impressions de pluie qui m’apaisent.
Il n’est plus ni gaieté ni tristesse, je vis un entre deux d’émotion libéré de la pensée et de l’agitation.
Observatrice retirée, la vie, ma vie, toutes ces vies rythmées de morts, sont comme un film qui s’accélère et que j’observe en silence tandis que la pluie s’intensifie et bousculée de vent s’écrase sur les carreaux.

©Adamante (sacem)