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10/11/2024

Voyage onirique

 

Voyage onirique 

 

    J’ai souvent voyagé dans mes rêves, ne sachant trop ce qu’était la réalité pour les définir hors d’elle, mais l’important pour le voyageur onirique est de vivre intensément le voyage afin qu’il vous marque de son expérience. 

    « Sans sortir de chez lui le sage connaît l’univers et les hommes. » Voici, rendu de façon succincte, ce qui me reste d’une pensée de Lao Tseu. Parcourir le monde chez soi, en soi ou en chaussant ses bottes de sept lieux n’a, c’est vrai, que bien peu d’importance. Ce qui compte est le vécu, la conscience d’être à chaque instant du voyage. On peut se perdre à courir trop loin, ignorants que nous sommes à chercher ailleurs ce qui est en nous. 

    Dans mon rêve le soleil inondait de sa lumière un ciel vaguement brumeux où flottait un nuage rosissant, juste au-dessus d’un impossible oiseau tenant de la chauve-souris et de l’albatros. Peut-être une chimère. 

Sous ce qui me semblait être un arbre à palabres, aux plumetis roses et jaunes, une déesse tellurique, coiffée de cornes de cerf à l’instar des déesses celtes, se tenait droite comme la justice tandis qu’une sorte de roi pressé, aux enjambées de danseur, terminait sa course devant elle. 

    Était-ce pour lui rendre hommage, pour lui délivrer un message, ou n’était-il qu’un époux volage ? La Dame peu amène, drapée dans sa grandeur, le toisait du regard sans bouger. Derrière lui un enfant levait les bras semblant prendre plaisir, comme tout ceux de son âge, à l’arrivée d’un cavalier sans cheval. À l’horizon deux voiles s’éloignant de la côte commençaient à disparaître dans le brouillard. 

    Je regardais la scène essayant d’en saisir le sens. J’eus la sensation désagréable de faire partie de ceux qui écoutent aux portes. Mais aucun son, aucun mot ne me parvint. Le silence était lourd comme à l’intérieur d’une cage de verre. Je percevais la vibration de l’espace où tout se mélangeait, et je reste aujourd’hui convaincue d’avoir remonté le temps, de m’être égarée dans une dimension parallèle où je n’avais pas ma place. 

Eux me voyaient-ils ? 

 

nostalgie ce soir

la nuit a effacé le jour-

dedans moi, le vent

26/02/2023

Le dernier chant

 

Nathalie Guillon Manaud




Le dernier chant



    Au jardin, la douceur est partout. La terre a pris ses tons mordorés piquetés de feuilles, les arbres doucement s’intériorisent. Tout est nostalgie et le vent lui-même n’ose souffler trop fort. Mes pas se font discrets et mon regard caresse ce qui fut un somptueux parterre de fleurs. Mais la beauté n’a pas fui, elle s’est faite plus douce, pacifiée par les saisons et le lent retrait de la sève. 

    Quelques esprits sont là qui tiennent conférence sur des tiges qui ploient. Une reine incline sa tête vers le sol. Temps est venu pour elle de s’effacer, de libérer son cœur de ses espoirs de germe pour les confier au cocon de l’hiver annoncé. Il les couvera jusqu’au grand réveil de la nature


tout passe tout s’éteint

l’ombre enlace la lumière-

dernier chant d’oiseau 

Adamante Donsimoni - 24 février 2023 ©sacem


L'HERBIER DE POÉSIES




14/11/2019

La fille d'algues





Elle est là, alanguie, bercée de vagues, façonnée de courants. Fille d’algues et sable, princesse des tourbillons, elle s’abandonne.

Une vague s’en va
comme vie se retire
jeu de l’illusion

Est-elle pythie, oracle des profondeurs ou accident, cette déesse aux multiples seins révélée par l’océan ?

Elle est, c’est un fait
là, offerte à nos regards
l’instant du rêve

Elle porte en elle des visages, esquisses nées de ses pensées qui créent dans l’instant celui d’après.

Beauté fugace
que le vent ébouriffe
avec la vague

beauté sans lendemain
reine de l’éphémère.




©Adamante Donsimoni (sacem)





15/02/2019

L’eau et le bois mort

De l’eau, le soleil, comme de la mère et père tout à la fois, l’enfant.
Du milieu aquatique, le bleu reflet de ciel, le vert. L’air nourricier indispensable aux racines joue d’échanges gazeux à la surface du magma.

Une fougère
quelques algues alanguies
et le bois mort

Il flotte dans le courant
un grand désir d’ascendre


Le monde balbutie, expérimente formes et mouvements, couleurs et parfums. Déjà il est en partance pour sa fin. L’or du printemps est éphémère.


Vivre c’est s’user
aux frottements incessants
du temps qui passe


Le rouge n’a qu’un temps, il brûle puis doit laisser place. La cendre succède au feu, c’est la loi.


Tenir n’est pas vivre
vivre n’est pas soumettre
vivre c’est être


Vivre, c’est comprendre la nécessité de composer à chaque instant avec le chemin, de s’arrimer, racine bien en Terre, afin d’accueillir le ciel. Demeurer tout à la fois souple et droit, c’est cela la maîtrise.


L’homme déterré
déboussolé, titube
au final, noyé.


Adamante Donsimoni ©sacem
sur une toile de MarHack




MarHak


30/06/2017

Allée des pas perdus…



 
Allée des pas perdus… ça pour l’être ils le sont ! L’esprit un peu rêveur on baguenaude sans voir dans un entre deux sans durée où le regard se berce de nature.  Vertu des grands espaces,

les pieds sont ici,
et la tête est ailleurs
on ne sait plus trop

Mais, ici ou là, quelle importance ! Comblé de ce rien qu’est l’instant, on se donne aux doigts de la brise pour ressentir la vie, respirer, s’imprégner du paradis qui frémit, là, juste sous votre peau.  Et puis soudain,

au pied d’un hêtre,
couché entre deux racines,
un nouveau-né

allongé dans la mousse
il tète encore sa mère

Cette apparition c’est l’offrande de la Terre pour fêter le prodige de votre abandon. L’arbre complice vous a ensorcelé. L’enfant du hêtre s’offre et pénètre votre immobilité de sa palpitation végétale.  Alors résonne en vous ce bruit de succion intemporel qui vous accompagne depuis la nuit des temps, à chacun de vos pas.

               ©Adamante Donsimoni (sacem)

image Françoise Isabel






04/02/2017

De fleurs, d’herbes et de ciel




Je suis le chemin des fleurs jusqu’au ciel duveteux. Chemin des framboisiers qui dépassaient la tête de l’enfant aux yeux pleins de cette lumière des choses du bonheur. Pas de vent, pas de tempête, aucune menace, sous ce ciel de joie où fuse un oiseau, mi-ange, mi-dragon. Les couleurs s’enchantent et dansent vers l’horizon leur mélodie de nature.

Le chant des herbes
une débauche de verts
caresse les fleurs

Le murmure de l’eau nourricière fait reverdir la terre. L’eau, toujours attentive à dispenser la fraîcheur indispensable à la vie est présente partout. Rien pour troubler la paix jaillissante et communicative, ici le temps s’oublie dans la vibration de ce qui est à sa place.

L’instant se donne
à peine un souffle de vie
et le silence

Les liens de l’amour se tissent simplement dans l’absolu schéma de l’épanouissement sans désir ni question. Les parfums s’offrent pour le grand bal de la pollinisation et chacun trouve, agit et s’accepte selon sa nature.

La voix du miel
éperdue de pollen
vibre à l’infini

Chaque chose, chaque être profite de l’instant offert sans penser ni à hier ni à demain, il n’est aucune place pour l’inutile. La vie s’offre dans la vibration de l’essentiel, on la reçoit, l’accueillir est la seule voie vers la liberté.

©Adamante Donsimoni (sacem)




01/05/2014

Inondation



Un banc dans la boue
le regard s’y repose
en contemplation

l’esprit s’apaise et vogue
sur les rives inondées.

Partout, la force des eaux impose son silence.
Le flot emporte biens et meubles, efface toute certitude, réduit à néant l’idée de la sécurité si chère aux Hommes et leurs larmes stériles gonflent le courant indifférent au désarroi.
Les arbres se reflètent en ce miroir trouble où les herbes se font algues. Dans la nature tout s’adapte. C’est comme si l’éternité enracinait le temps pris au piège des métamorphoses.

Demain la décrue
la boue offerte au soleil
la renaissance.

©Adamante-sacem