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08/03/2018

EXPIATION

Richard Dadd, Le coup de maître du bûcheron-magicien

Expiation


Au pays des fées, des elfes et des gnomes quelques élémentaux jouent du clairon. Est-ce en l’honneur de l’arbre abattu, invisible, ou pour saluer les retardataires venus célébrer sa mort ?

Un imbroglio de ramures innerve le paysage de Dadd. Mémoire vascularisée. Il y a là une menace. Des flèches se dressent vers l’horizon interdit, les marguerites poussent sur la pierre et des boulets de marrons jonchent le sol. Le bûcheron lève sa hache sur le vide. Expiation !

L’arbre qu’il veut abattre, n’est-ce pas ce petit vieux rabougri à la barbe blanche, assis au sol, le regard dur et qui lui fait face ?  L’abattras-tu ? semblent lui demander ceux qui sont autour et qui l’observent, en seras-tu capable ? Ils sont tellement nombreux à hanter le paysage. Il va le faire. Il va le faire, grincent des monstres sans cou, tête tassée dessus leur tronc. Fantômes tronqués, écrasés comme autant de souvenirs enfouis. Il va le faire, il doit le faire !

L’immense bûcheron refait et refait son geste dans sa tête envahie de troubles qui dégoulinent sur la toile comme pour marquer à jamais l’acte expiatoire du peintre.

Au pays des contes d’Orient ou d’Occident, la mort est toujours présente. Shéhérazade lui échappe nuit après nuit, ailleurs on fait danser les méchantes belles-mères sur des plaques chauffées à blanc pour les punir et, toujours, on mange les petits enfants.

Adamante Donsimoni (sacem)
Sur une toile de Richard Dadd, Le coup de maître du bûcheron-magicien, 1855-1864, 
huile sur toile, 54 x 39 cm, Tate Britain, Londres



Portrait de Richard Dadd, vers 1856
Le peintre, Richard Dadd, débute sa carrière artistique tout à fait normalement. Mais après un voyage en Orient, il sombre peu à peu dans la folie.

Au point de devenir complètement incontrôlable : victime de pulsions meurtrières, il assassine son propre père !

Dadd est donc immédiatement enfermé dans un asile. À cette époque, ce type de lieu ressemble davantage à une prison où les "fous" n’ont pas vraiment de soins.
    Il a cependant l'autorisation de continuer à peindre. C’est là où, pendant près d’une dizaine d’années, il va notamment travailler à cette toile énigmatique…

Le peintre Effrayé par l'idée même du vide,  passe et repasse des dizaines de couches de peinture pour chaque petite figure sortie de son imagination. Résultat : à certains endroits, la peinture est quasiment en relief !

Sa production en tant que "peintre aliéné" est connue du public de l’époque. La presse salue son talent extraordinaire, et l'Art Journal, ironiquement, lui reconnaît une "capacité à l’imagination indemne" ! De son côté, depuis sa cellule, Dadd continuera à créer jusqu’à la fin de ses jours.
Source ARTIPS  

 L'HERBIER DE POÉSIES                         
Détail de l'œuvre
 

03/03/2018

À ma mère





 
Le temps s’enfuit
et les années s’entassent
mais pas ton souvenir

tu serais bien vieille, aujourd’hui
pour ton anniversaire

Adamante Donsimoni (sacem)


01/03/2018

C’était la Dame bleue



Tout est bleu, la terre, l’eau, le ciel et mon regard. Non, ce n’est pas du flou qui fait vibrer l’espace. Il y a là un appel à l’unification

L’air épouse l’eau,
la brume d’éternité
apaise l’âme

L’horizon ne dit plus son nom, tout ce bleu le dévore.  C’est alors qu’une silhouette m’apparaît. Elle descend de mon regard pour se poser, comme un oiseau, sur cette écume de rêves. Je me souviens…

C’était la Dame bleue,
elle m’invitait à la suivre
mais il faisait trop froid

Au bord de la plage, si loin de ce rendez-vous manqué, enveloppée de bleus, je m’abandonne.

©AdamanteDonsimoni (sacem)




 


28/02/2018

Le merveilleux et les voyages dans l’imaginaire




Un ami,  sur la toile, avait publié une réflexion ayant pour thème :
« Qui écrit en moi, quand j’écris, et pour qui ? »       
« Se préoccupe-t-on du destinataire dans sa pratique artistique ? »




Je n'ai guère le goût de l'introspection, mais en le lisant il m'est venu plein d'idées. Je les lui ai livrées un peu décousues, telles qu'elles me sont venues. C’est le lot des commentaires. Puis j’ai approfondi.  J’ai cherché comment je pourrais expliciter mon vécu au travers des arts, avec la dimension énergétique.

En se situant au-delà de l'esthétisme, je dirais que les images, les formes, les couleurs (ou leur absence) sont en quelque sorte les mots du peintre, un geste de lui vers la toile et lui revenant. Geste qui  ira ensuite vers le spectateur de son œuvre. Son œuvre est un message au-delà des mots, l'expression de sa part d'humanité exprimée sans qu'il en soit obligatoirement conscient. « Porte-voix » en effet, au même titre que l'auteur, « d'une humanité en recherche ».
L'auteur, le peintre, mais on peut ouvrir aussi à l'interprète, va puiser à la source de son être pour exprimer au monde : Je suis. Ce disant, c'est à lui qu'il crie être, à cette immensité qui l’habite, qu’il pressent être lui, mystère qui tout à la fois l’attire et lui fait peur ou tout au moins le trouble. Sans cette reconnaissance de ce lui-même, aucune paix ne pourra jamais l'habiter. 
Intuitivement, il sait trouver dans l'art, car l’art nécessite de lâcher prise, la clef qui pourrait bien ouvrir ce sésame porteur de cette joie, seule en capacité de le faire libre. 
Il sait qu'en face de lui, les lecteurs, les spectateurs, ces innombrables "lui-même" ressentent aussi ce manque. Alors en peignant, en écrivant, en interprétant, patiemment il construit le pont qui lui permettra le partage.

L’art et le merveilleux, une symbiose créatrice

L’Art nourricier, l’art eau de la vie, l’art catharsis, cela ne se peut que sur la base d'une bonne technique. Il est indispensable d'apprendre à marcher avant de courir.
« Dans tous les arts, la connaissance de la technique peut quelquefois étouffer l’étincelle de l’inspiration chez un artiste médiocre ; mais la même technique, entre les mains d’un maître, attise au contraire cette étincelle et en tire des flammes dévorantes. »  Josef Jasser (citation tirée du livre « Être acteur » de Michael Chekhov, le livre de chevet que je conseille aux comédiens).
Celui-là crée qui développe sa flamme, il touche à la dimension du merveilleux qu'il sait intuitivement exister en lui.

 "Le merveilleux continue aujourd'hui, malgré les complets vestons et les robes de grande couture, malgré les progrès mécaniques ; il est présent dans l'homme embrigadé à l'usine ou au bureau, revêtu de l'uniforme le plus monotone ; il est le mystère des nuits, non qu'il soit fait d'obscurité, mais parce qu'il est lumière dans la nuit. Il est suffisamment présent pour nous attirer, en toutes occasions, à l'appel de son nom et pour qu'à l'audition de certains poèmes nous sentions un trouble étrange et ayons l'impérieux besoin de nous dépouiller du vieil homme dont le poids continue à peser sur nous tous." Pierre Mabille  « Le merveilleux »

Oui, le merveilleux nous fait voyager dans l’imaginaire, la visualisation l’accompagne et quand on sait que l’esprit peut tout pour nous, on sait alors que l’on a tout pouvoir sur sa vie.  Notre pensée a une force, une force immense qu’il est préférable de diriger dans la bonne direction pour ne pas en souffrir au quotidien par ce que j’appelle les « pensées marche arrière ». Ces pensées qui grignotent à chaque instant notre confiance et nous réduisent à l’état de victime.
Vous comprendrez alors pourquoi, depuis toujours, dans les ateliers que j’anime, je propose systématiquement ces voyages qui permettent, au travers de notre abandon, de vivre les retrouvailles avec notre enfant intérieur, ce qui nous permet, en conscience, de devenir vraiment créateur de notre vie et de donner corps à nos rêves.

©Adamante Donsimoni(sacem)





23/02/2018

Le chemin de la brume






Il avait suivi le chemin de la brume vers un horizon disparu. Chacun de ses pas crissait, seul bruit pour lui rappeler le monde. Les flocons empressés de fondre ruisselaient sur son visage rougi de froid. Les pleurs sont de l’eau juste un peu plus salée.

Solitude blanche
quelques pas dans la neige
une indiscrétion

Où allait-il ainsi dans ce désert fantasmagorique ? Qui était-il ? Que fuyait-il, s’il fuyait ? Qu’allait-il donc rejoindre ? S’était-il égaré ? Était-il Elle ou Lui ?
Si les arbres pouvaient parler, ils nous diraient bien des rencontres. Mais ce soir, l’arbre est muet comme le sont les arbres.

Il offre à nos yeux
sur l’océan de brume
quelques traits au fusain


Ici, la terre s’est unie au ciel, tout se confond à tout et le géant immobile semble rêver d’envol. Le passant, arbre en mouvement, a disparu, laissant derrière lui sur le sol immaculé quelques empreintes que les flocons effaceront bientôt.

Ainsi va l’Homme
quelques traces fugaces
au final, l’oubli.
 
©Adamante Donsimoni (sacem)


15/02/2018

Luna, petite fée de la Lune



Image Adamante

Si vous me demandez ce qu’est pour moi la magie, je vous réponds ce soir, ce sapin, ces fleurs, les herbes qui racontent des histoires au vent à moins que ce ne soit le vent qui les raconte aux herbes.

Le vent, les herbes
les mots doux de la terre
s’envolent au ciel

La magie c’est aussi, ici dans ce décor de conte de fées, le souvenir d’un miaulement furtif, il faisait nuit noire, celui d’un chaton perdu. 


Juste une plainte
enveloppée de l’ombre
et ma cécité

Le lendemain, une autre voix, plus rauque se fait entendre. Qui es-tu ? je demande. Et la voilà qui s’approche flanquée de son chaton. Ce fut comme un émerveillement. Comment a-t-on pu les abandonner ? L’humain n’est pas toujours fréquentable.

La gentillesse
brûle dans son regard
un don du ciel

Je lui parle.  Il me semble la connaître depuis toujours ? Elle se frotte contre moi, si confiante. Mon cœur fait une embardée. Son chaton indifférent ne voit qu’elle, tout comme moi. Je l’aime déjà bien trop pour la laisser errer la campagne. Ma fille l’adoptera.

Son amour offert
sans crainte ni retenue
est un don total

Elle la baptisera Luna, petite fée de la lune, Louloune.

Ce soir, les fées qui nous l’avaient confiée sont venues la reprendre.  Nos cœurs meurtris la pleurent. Mais en fermant les yeux nous savons son absence auréolée de lumière. Nous remercions l’Univers d’avoir croisé nos chemins.

 

Petite Luna
ce soir je chante pour toi
ce conte d’amour.

Adamante Donsimoni (sacem)




Ce 12 février 2018, jour du départ de Luna, j’ai écrit ce texte, un bien triste cadeau d’anniversaire pour ma fille.


08/02/2018

Phare diamant



Il ne sait plus dans quel sens tourner, pris de folie, comme un escalier, il s’enroule sur lui-même. 
Il veut tout capturer.
Les formes qui l’entourent, piégées dans ses facettes, s’abandonnent, révèlent des secrets montant des profondeurs de leur inconscient. 

 


Un plissé de calcaire déploie lentement ses ondes jusqu’au centre où l’œil d’Horus apparaît au-dessus d’un édifice vieux rose au cœur bleu.  Pyramide ou cadran solaire ? Qu’importe, c’est au choix. Il faut se laisser entraîner par la vibration, pénétrer le secret en gardant le silence. Mais autour c’est certain, il y a le désert, l’ombre et la lumière, le sable, la sècheresse, le désir d’eau qui s’exprime avec le blanc de craie. 



L’éventail se déploie ensuite en tonalités bleu acier. Rien de tranchant ici, le côté métallique des formes s’adoucit dans l’ocre rosée venue le tempérer et glisse imperceptiblement vers le poli des pierres médiévales. Au sommet de la première lame bleue, un visage, le nez en tête de serpent dont le corps s’enroulant au-dessus de la tête, suggère une corne de bélier. 




Effigie romaine, masque maya, intaille magique, plus je la regarde et plus je contemple une véritable œuvre d’art.

  
Cette forme mystérieuse qui me parle avec tant de force, ne serait-ce pas un simple et banal phare de voiture ?
Phare diamant où se reflète un pan de l’histoire du monde. Il n’est rien de plus riche que la simplicité, il y a dans le banal tant de choses à découvrir.

©Adamante Donsimoni (sacem)
6 février 2018
http://le-champ-du-souffle.blogspot.fr/




Une photo d'ABC  





05/02/2018

Ce que je fus avant le tambour




Mon corps, la peau du tambour. Le son résonne, pénètre au plus profond de la forêt, se mêle au bruit d’une chute d’eau. Tout me semble démesuré. Je marche au-dedans de moi, m’enfonce dans cette végétation plus vraie que nature. Ma terre tremble, je vacille. L’éternité cogne au rythme de la baguette serpent, boum !
boum ! boum ! Battements irréguliers du cœur de la Pachamama. Boum ! j’ai oublié mon nom. Boum ! ma peau tendue. Boum ! je suis le tambour. J’ai tout oublié sauf la vibration. Le courant qui me parcourt poursuit le chemin de l’eau et rebondit sur les rochers de l’intemporalité.
Rien n’est plus réel que cet oubli sans tain, la transparence.  Force du désir de plonger au plus profond dans les entrailles minérales de mes espaces intérieurs. Abysses sidéraux où naissent et meurent les étoiles dans cette nuit primaire où je m’anéantis. Je ne sais plus rien que le goût amer des herbes sur ma langue plombée et la voix du tambour qui sonne l’abolition de mes frontières.
Ne me dites pas que je rêve, le lichen sur ma peau trahirait le mensonge. Je ne suis plus que sommeil et poids, présence végétale, anesthésiée, à la croisée de dimensions qui se disputent ce souvenir à peine perceptible de ce que je fus avant le tambour.

©Adamante Donsimoni (sacem)
    le 17 février 2017


Un texte né d'une expérience chamanique au travers d'une lame de tarot. Depuis des lustres je me promène ainsi au travers d'éléments divers et variés, une pomme, une feuille, un rocher, le vent... Depuis des lustres, je fais des expériences et dirige des ateliers autour de ces voyages dans l'imaginaire qui sont découverte et enrichissement.







25/01/2018

Le lac




Il s’étire entre terre et ciel, il balance doucement les reflets moutonneux et sombres des nuages

Loin, à l’horizon
quelques sommets, la neige
et là-bas, le froid

Les buissons impassibles observent du rivage le flot ininterrompu de ces porteurs d’eau, voyageurs infatigables qui traversent les airs, masquent le soleil.

La terre humide
se transforme, voici la boue
aux pieds des herbes

Nul ne se risque sur les rives. Le lac médite sa nature profonde dans le silence d’un hiver trop mouillé.

©Adamante (sacem)
http://le-champ-du-souffle.blogspot.fr/






  






18/01/2018

Le gredin gourmand




Sur une œuvre de Françoise Isabele

Il tire la langue le gredin


caché sous ses colifichets de bazar à quelques euros
il a tout pris

    papier d’alu
    papier cadeau
    enveloppe
  pellicules
carton
un fouillis de couleurs 

pour s’y rouler



ô comme il tire la langue le gourmand

la confiture de fraises cuisinée par mémé dégouline

gourmand
gourmand
gourmand


Tu exagères !



cerises au bout du nez
maquillé ananas et pommes d’amour

Tu devrais avoir honte !


tu a sali ta belle chemise bleue

taguée
déchirée
noircie
cheveux hirsutes

tu t’es roulé dans la peinture


Et tu crois sincèrement passer inaperçu ?


©Adamante Donsimoni (sacem)