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07/02/2019

Dans l’absence de tout




Vivre, s’incliner devant le moindre brin d’herbe jusqu’à le devenir et laisser s’effacer toute idée de séparation.

Le regard se voile
quand le cœur s’illumine
-un chant d’oiseau

Qui a pris le relais dans ce retirement où flottent des idées ? Elles passent, libres, sans importance. Cohorte insignifiante sur qui rien ne s’agrège.

Un cœur qui bat
un souffle qui va et vient
-les couleurs du vent

L’avant, l’instant, se confondent. Tout ce qui fut est là, palpitant au cœur d’un soi  affranchi des frontières.

Le temps effacé
je vis mon éternité
-quelques gouttes de pluie

tout est là qui me parle
dans l’absence de tout.









31/01/2019

Dessine-moi une rose


L’indéfini fait de nouveau se mêler le haut et le bas
Ciel et terre, embrassés, jouent de l’illusion
L’avion de Saint Ex. s’abîme au fond des eaux
Ainsi naissent les légendes
Le petit prince déboussolé s’incline vers un phoque :
- « Dis, dessine-moi une rose ! »
Le renard dépité, glougloutant, s’agrippe à un mur
Vestige d’une ville tentaculaire engloutie
Ne pas sombrer surtout, tenter de regagner la surface
Ne pas finir noyé d’eau et de chagrin
Comme cette pauvre Mélusine
Maudite une seconde fois
Vaincue par la pression des eaux primordiales
Trahie par les sources, les rivières…
Sous le regard compatissant de Nout
Déesse du ciel apparue là sous sa forme de vache sacrée
Elle glisse doucement vers le fond de la mer
Comme on s’abandonne aux bras de l’amour
Retour à la maison
Atlantes, Atlantide, Atlantis…
Flot hypnotique des mots qui tournent dans sa tête jusqu’à l’extinction
Le silence

Demain
Comme chaque matin
Le soleil, enfanté par Nout, renaîtra en fin de sa course nocturne
Râ, la bouche, porteur de la puissance deviendra Rê, le feu du verbe
Vainqueur momentané d’Apophis, le serpent d’eau
Un, enfin réunifié
Le monde resplendira de sa lumière

Demain
Comme chaque soir
Nout avalera Rê
Râ reprendra son combat contre les ténèbres

Demain
Tout sera oublié
Tout sera à recommencer

Un jour efface l’autre
Course immuable de la roue des transformations
Sans cesse, le phénix meurt et renaît de ses cendres
Et tout est vanité qui ne se situe pas au centre
Où seule l’immobilité vibratoire est pérenne.


Adamante Donsimoni (©sacem)

sur un dessin de Jamadrou





25/01/2019

L’homme des étoiles





Je rentrais tard ce soir-là, mains dans les poches, je marchais vite pour me réchauffer tout en pensant au parfum de la soupe qui m’attendait. Soudain, en levant les yeux, je l’aperçus.

Marchant dans le ciel
comme une ombre entre les astres
il m’observait

J’oubliais le froid, la soupe. Le nez en l’air, je restais là, subjuguée comme un chien de chasse à l’arrêt. Qui pouvait être cet inconnu des nuages ? Le petit gardien d’étoiles du livre qui berça mon enfance ?

Tout ridé, barbu
comme il paraissait vieux 
-l’enfance est loin

Le temps de penser au temps, l’homme des étoiles avait disparu. Elles me l’avaient repris.

Le froid revenu
je goûtais l’instant présent
quel bonheur de vivre !

Adamante Donsimoni (©sacem)








18/01/2019

Comme un oiseau englué






La forme se cherche, tente de s’extirper du magma.
Lutte perdue ?
Qu’importe, le chemin est plus important que le but.

Comme un oiseau englué se débat, l’expression condamnée à l’informel s’épuise. Un cri peut-être, parcourant la vibration du bleu, s’évade un instant vers l’improbable avant que de s’évanouir dans l’insondable néant.

Monstruosité du chaos, la vie ne peut naître sans contractions et sans combat.
Ici rien n’est totalement défini, tout se cherche.
Combien faut-il de sursauts, d’ongles cassés, de reculs et d’avancées pour tenter d’échapper au désespoir de ne pas réussir à être.
Car la loi ici, c’est s’affirmer, s’extraire de la gangue pour devenir
Libre.

Adamante Donsimoni ©sacem




21/12/2018

Forteresse à la dérive



œuvre de Krist Dimo




La forteresse au regard de sphinx dérive sur la mer comme un iceberg arraché à la banquise. Tête d’homme marquée d’une croix, raccommodée de bleu, d’acier. Cette cousine de la créature de Frankenstein semble dubitative.

Sensibilité
ce que l’on croit des monstres
une absurdité

L’œil à l’écoute, l’oreille au aguets, entend-elle la folie qui agite le monde ? Vomit-elle cette eau qui ruisselle de sa bouche sur l’ardoise de son socle, comme on se libère d’un trop plein de désespoir ?

Colosse égaré
dans cet univers gris bleu
l’impuissance, le froid.

Adamante Donsimoni © sacem



Krist Dimo







09/12/2018

Gigue de l’éternelle jeunesse



"Danse avec matou" huile/toile - 30x30 - Adamante




Gigue de l’éternelle jeunesse

Claquent les sabots sur la terre battue. Ce soir, rituel : on danse la gigue de l’éternelle jeunesse parfumée au granit. Adieu arthrite et lumbago ! C’est la nuit, des « sans dents », des « plus d’âge », des « riens », des oubliés, des simples, au fond de leur cambrousse.


Dès potron-minet
le chat, griffes endiablées
« tricote-ronron »

le fil « s’empapillonne »
et la laine « s’ensouris »


L’éclat du feu sur une boule de Noël a ensorcelé mes visions. Je rêve !


Ici les possibles
se sont donnés rendez-vous
-quel froid cette nuit !



©Adamante Donsimoni (sacem)

30/11/2018

Mysticisme libertaire



Comme un typhon surgissant de la brume, j’ai vu se dessiner la silhouette d’un Djinn, mais il n’y avait pas de lampe à huile. Voilà que les codes étaient bouleversés. Un génie sorti de nulle part, glorifiait l’inconsistance d’une vapeur plus floue que la divinité même. Ce génie pied de nez à la tradition, grand désorganisateur de la création, tourbillonnant sur lui-même comme pour signifier son caractère insaisissable, était l’incarnation de l’inacceptable.
Que de remous, que de remugles s’agitèrent alors au sein des croyances jusqu’ici si bien bordées d’assurances et de lois, accordées sur la note cristalline de la transcendance paternelle si rassurante. Alléluia !
Quel désarroi ! Même marcher sur la tête me semblait plus plausible face à cette  irruption à peine définie, issue de cette vapeur insoumise, bafouant tous les repères jusque-là glorifiés. Le vide, j’étais face au vide et je perdais pied devant ce néant à peine esquissé. Mon cœur s’embrasa soudain. Le foyer nourrit par cette démonstration insurrectionnelle assécha tout ce qui en moi comptait d’humidité. Je vivais la combustion spontanée de mes certitudes qu’aucune branche, croisée lors de cette ascension irrépressible de mon esprit troublé, ne pouvait arrêter. J’avais largué les amarres, la terre s’éloignait de mes pieds, je connaissais le vertige des altitudes. J’étais réduite au feu du mysticisme libertaire, dérivant dans l’entre deux d’un monde inexistant.

Adamante Donsimoni (sacem)




jamadrou

16/11/2018



Le chant des loups



Le fouet cinglant du vent dans l’ombre des pins provoque
le froid irritant de l’hiver. La mousse perlée amortit les
terreurs portées par la vibration des brumes.
L’univers tout entier se raconte dans les souffles de la
forêt.

L’air du chant des loups
enfle à la cime des pins
-un chemin perdu

Des siècles d’angoisses tissés de mousses humides
s’inscrivent dans ce grand livre ouvert sur la cécité du
monde.
Il n’est pas un brin d’herbe qui ne soit conscient de la vie.

Trop de ténèbres
au coeur de l’humanité
et juste les sapins

le rêve d’éternité
est perclus de mensonges.

Adamante Donsimoni (sacem)

Steve Mitchell - aquarelle -








09/10/2018

Le silence de la forêt primaire


Retrouver le silence de la forêt primaire, le lourd parfum d’humus sous les pas enfouis.
Quitter les turbulences et les idées râpeuses pour que le cœur enfin s’abandonne au rythme initial de la palpitation du vide où tout est en suspens.
Trouver dans la fournaise le courant de fraîcheur et dans le froid le feu.
Glisser jusqu’au-dedans où l’indéfini commence.
Pénétrer les ténèbres concevant la lumière.
Mourir à tout vouloir pour le rien essentiel et se retrouver nu dans la plus infime des dimensions, reliée à l’immensité.
Oui, vivre la puissance de l’osmose annihilant mots et pensées dans le silence de la forêt primaire.


Adamante Donsimoni(sacem)
23 juillet 2018 après une matinée criblée de verbiages stupides

Hélios Anthos, Hélianthus



photo  Marine


Dans le soir finissant, alors que la lumière irradie l’océan, je marche sur le chemin de grève. Le parfum de quelques épineux m’éveille.
Quel bonheur de vivre !

Un rien qui s’offre
avec le vent complice
et tout est parfait.

Quelques fleurs s’empourprent en cette arrière-saison. Filles naturelles du Dieu flamboyant, enfants de la Terre où elles accrochent leurs racines jusque dans les sols les plus rudes, elles tirent leurs langues d’or au ciel.

Soleils et fleurs
petits astres délicats
magnificence.