Journée de la femme, journée de la meurtrisse planétaire.
Aujourd'hui je suis avec l'AFAM ONG.
Nous recevons des enfants Yézidis qui sont venus à Paris pour nous présenter un spectacle. Il y aura des témoignages poignants, des films, expo photos, littérature. voici un poème que j'ai écrit que je lirai dans la soirée.
Je le dédie à toutes les femmes meurtries de la planète.
Comme elle est longue la liste
des
souffrances planétaires
comme
il est pénible le chemin de l’exil
comme
il est terrible le souvenir des morts
comme
elle est épouvantable l’offense
Atterrée,
je regarde le monde
partout
le sang
partout
la honte
partout
le déshonneur
partout
l’exploitation, la domination, le mépris
Dans
cet orchestre hurlant à la gloire du plus fort
la
tonitruance des cuivres bâillonne le glissando de la harpe
l’homme
conquérant, expert en tortures, parade
l’autre,
différent, le dérange
le
vacarme des armes extermine ses chants
Dans
ce concert assourdissant de cris et de douleurs
en
Terre
le
combat
ce
yang explosif
ce
feu prit de folie
se
dit plus fort que l’eau
Quelle
présomption
Quelle
ignorance
tout
vient de l’eau et y retourne
l’eau,
la mère primordiale
l’eau,
l’insondable mystère sans qui rien ne vit
Il
n’est aucune victoire à ces combats
qu’ils
soient territoriaux, économiques ou religieux
l’issue
n’est toujours que désolation
La
peur fait se dresser les glaives
comme
plumes et poils depuis la nuit des temps
La
folie meurtrière en est l’expression viscérale
peur
de l’ombre, de la nuit, de la mort
peur
de la femme
peur
de sa propre dualité, de sa propre désunion
il
s’en suit la rupture, la pauvreté,
le déséquilibre…
Que
de défaites
L’équilibre
précieux
parce que fragile
tient
au respect
à l’ouverture
du cœur
l’inconnu
nous révèle un peu de nous même
car
l’autre, tous les autres
jusqu’au
plus effroyable assassin
est
une partie de nous dans le grand bain de la manifestation
Dans
ce grand univers vibratoire
nous
sommes tous liés par une attache indestructible
À
cette idée, tout en moi s’insurge
jusqu’à
ce que, empêtrée de faiblesse
je
sente monter cette force inconnue de l’accueil
cette
force invincible qui me dilate et m’extrait de la réaction
cette
force de résurrection qui n’est autre que l’amour
Yézidis
Trois
syllabes
la
déchirure d’un ciel de paix
Yézidis
la
volonté de vivre selon ses racines
comme
une plante accrochée au granit
se
bat pour fleurir
La
force de la terre des ancêtres
s’exprime
en trois syllabes
Yézidis
Trois
syllabes, trois perles d’espoir.
Adamante
Donsimoni
7
mars 2019
Je rajoute ici, ce 9 mars 2019, une video poignante qui m'a été offerte en commentaire. Merci à une "vieille marmotte", Françoise, dont les visites me sont précieuses.
C'est vrai, j'ai peu de visites, je ne suis pas au top des blogs car je n'ai pas le temps de voyager trop sur le web, mais la qualité de mes visiteurs, je devrais plutôt dire visiteuses, vaut largement la quantité.
Un âne sans bonnet, il est sur la
tête du peintre. Vanité de la possession masculine dans un milieu où, sur les
murs des beaux-arts, je me souviens, fleurissaient des formules poilues :
« zob
+ zob = zob »
« Navrance » d’un
milieu dopé à la testostérone pour qui la femme est à immortaliser nue sur une
toile et à baiser le soir entre chansons paillardes et vinasse. Qu’importe l’incongruité du
lieu où on la représente, on peut la voir en tenue d’Ève incarnant la tentation,
assise sur une pelouse entourée d’hommes portant costume et haut de forme.
Vanité !
Le monde de ces hommes a réduit
la femme à se soumettre, celle qui tente de s’en libérer devient une Camille
sublime happée par la folie.
Entre sublime et déchirure, la
stupidité des codes. En photographie par exemple, le vintage vaut de l’or, la
découverte post-mortem d’une œuvre ne vaut que pour le regard.
Vanité !
Que voit cette femme observant
ce mari ridicule brossant un âne sur son pubis ?
Penchée vers lui elle semble étonnée.
Apparaissant telle une observatrice extérieure, son expression pourrait laisser
à penser qu’elle est en passe d’éclater de rire.
« Pauvre fou ! » la pensée traverse la toile.
Et comment le voit-elle cet
amant, bâtant l’âne pour le réduire à une monture ?
Le tableau ne le dit pas. Soyons
libres d’imaginer. Mais est-ce bien nécessaire ?
Dans la vie et dans l’art, de
Shéhérazade à ces ânes, le piège de l’espèce se referme sur l’errance bipède
où, malgré l’évolution, quelque part encore, une formule lézarde les murs :
De l’eau, le soleil, comme de la mère et père tout à la fois, l’enfant.
Du milieu aquatique, le bleu reflet de ciel, le vert. L’air nourricier indispensable aux racines joue d’échanges gazeux à la surface du magma.
Une fougère
quelques algues alanguies
et le bois mort
Il flotte dans le courant
un grand désir d’ascendre
Le monde balbutie, expérimente formes et mouvements, couleurs et parfums. Déjà il est en partance pour sa fin. L’or du printemps est éphémère.
Vivre c’est s’user
aux frottements incessants
du temps qui passe
Le rouge n’a qu’un temps, il brûle puis doit laisser place. La cendre succède au feu, c’est la loi.
Tenir n’est pas vivre
vivre n’est pas soumettre
vivre c’est être
Vivre, c’est comprendre la nécessité de composer à chaque instant avec le chemin, de s’arrimer, racine bien en Terre, afin d’accueillir le ciel. Demeurer tout à la fois souple et droit, c’est cela la maîtrise.
Vivre, s’incliner devant le moindre brin d’herbe jusqu’à le devenir et laisser s’effacer toute idée de séparation.
Le regard se voile
quand le cœur s’illumine
-un chant d’oiseau
Qui a pris le relais dans ce retirement où flottent des idées ? Elles passent, libres, sans importance. Cohorte insignifiante sur qui rien ne s’agrège.
Un cœur qui bat
un souffle qui va et vient
-les couleurs du vent
L’avant, l’instant, se confondent. Tout ce qui fut est là, palpitant au cœur d’un soi affranchi des frontières.
Je rentrais tard ce soir-là, mains dans les poches, je marchais vite pour me réchauffer tout en pensant au parfum de la soupe qui m’attendait. Soudain, en levant les yeux, je l’aperçus.
Marchant dans le ciel
comme une ombre entre les astres
il m’observait
J’oubliais le froid, la soupe. Le nez en l’air, je restais là, subjuguée comme un chien de chasse à l’arrêt. Qui pouvait être cet inconnu des nuages ? Le petit gardien d’étoiles du livre qui berça mon enfance ?
Tout ridé, barbu
comme il paraissait vieux
-l’enfance est loin
Le temps de penser au temps, l’homme des étoiles avait disparu. Elles me l’avaient repris.
La forme se cherche, tente de s’extirper du magma.
Lutte perdue ?
Qu’importe, le chemin est plus important que le but.
Comme un oiseau englué se débat, l’expression condamnée à l’informel s’épuise. Un cri peut-être, parcourant la vibration du bleu, s’évade un instant vers l’improbable avant que de s’évanouir dans l’insondable néant.
Monstruosité du chaos, la vie ne peut naître sans contractions et sans combat.
Ici rien n’est totalement défini, tout se cherche.
Combien faut-il de sursauts, d’ongles cassés, de reculs et d’avancées pour tenter d’échapper au désespoir de ne pas réussir à être.
Car la loi ici, c’est s’affirmer, s’extraire de la gangue pour devenir
La forteresse au regard de sphinx dérive sur la
mer comme un iceberg arraché à la banquise. Tête d’homme marquée d’une croix,
raccommodée de bleu, d’acier. Cette cousine de la créature de Frankenstein
semble dubitative.
Sensibilité
ce que l’on croit des monstres
une absurdité
L’œil à l’écoute, l’oreille au aguets,
entend-elle la folie qui agite le monde ? Vomit-elle cette eau qui
ruisselle de sa bouche sur l’ardoise de son socle, comme on se libère d’un trop
plein de désespoir ?
Claquent
les sabots sur la terre battue. Ce soir, rituel : on danse la gigue de
l’éternelle jeunesse parfumée au granit. Adieu arthrite et lumbago ! C’est
la nuit, des « sans dents », des « plus d’âge », des « riens »,
des oubliés, des simples, au fond de leur cambrousse.
Dès
potron-minet
le
chat, griffes endiablées
« tricote-ronron »
le
fil « s’empapillonne »
et
la laine « s’ensouris »
L’éclat
du feu sur une boule de Noël a ensorcelé mes visions. Je rêve !